Le ministre des Finances (Minfi), Louis Paul Motaze (photo), a présidé le 7 août 2023 à Bangou (région de l’Ouest), un atelier de sensibilisation et de vulgarisation de Tresor Pay. Il s’agit « d’une plateforme digitale de recouvrement et d’encaissement des recettes non fiscales ». En d’autres termes, ce site permet de payer tous les frais exigibles par les administrations autres que les impôts et la douane. Il peut s’agir des amendes pénales, des loyers des immeubles, ou des frais de concours, de délivrance des actes judiciaires et extrajudiciaires ou d’établissement des titres fonciers et des permis d’exploitation des ressources forestières.
Jusqu’ici, l’État peine à maitriser la collecte de ces ressources. En 2021, le trésor public a recouvré 160 milliards de FCFA de recettes non fiscales sur un objectif de 187,4 milliards. Pour le budget 2023, en cours d’exécution, les recettes non fiscales sont projetées à 250,4 milliards sur un potentiel aujourd’hui estimé à 800 milliards de FCFA par le ministère des Finances. Avec Tresor Pay, le Minfi espère donc optimiser le recouvrement de ses recettes non fiscales pour atteindre le potentiel actuel. Ce qui revient à les quadrupler.
Depuis quelques années, l’optimisation de recettes non fiscales préoccupe le ministère de Finances qui doit faire face à l’insuffisance de plus en plus prononcée de ressources internes et à l’accroissement rapide des charges de l’État poussées notamment par les dépenses de sécurité, le service de la dette, les engagements relatifs à la mise en œuvre des projets de développement. Et de l’aveu même du ministre des Finances, 2024 ne s’annonce pas sur de meilleurs auspices.
Digitalisation des services du Trésor
« Les incertitudes qui pèsent (…) sur l’économie mondiale invitent à la prudence quant à la prévision d’une hausse substantielle du niveau de ressources propres en 2024, dans un contexte de baisse des cours et d’effritement progressif du potentiel de mobilisation des recettes pétrolières, dont les projections du dernier cadrage budgétaire prévoient, pour 2024, une diminution de plus de 195 milliards de FCFA par rapport à 2023 », a prévenu le Minfi à l’ouverture du séminaire de lancement des activités de préparation du budget 2024, le 13 juillet 2023 à Yaoundé.
À l’occasion, Louis Paul Motaze a préconisé le renforcement de la contribution des recettes non fiscales aux ressources de l’État, « compte tenu du potentiel non encore budgétisé, des marges de progression encore importantes en la matière et malgré les effets sur les revenus des ménages de la flambée des prix des produits de première nécessité ». Pour y parvenir, a poursuivi le Minfi, « les services d’assiette devront veiller à mettre en place une administration dynamique, ingénieuse et moderne, reposant sur une organisation appropriée, une utilisation plus large des nouvelles technologies et un personnel compétent, dévoué et motivé. »
Le lancement de Tresor Pay s’inscrit dans le cadre de la modernisation des services du Trésor public camerounais. Il s’agit d’en faire une administration digitale en vue « de sécuriser le circuit d’encaissement des recettes publiques en limitant l’utilisation des espèces dans les services financiers de l’État et (…) de maîtriser les risques d’atteinte à la fortune publique ». Louis Paul Motaze présente d’ailleurs Tresor Pay comme « une plateforme prémonitoire à l’émission envisage de la monnaie électronique du Trésor au travers de laquelle seront effectués des paiements électroniques en ligne, des paiements électroniques à base de la monnaie mobile du Trésor et des cartes monétiques estampillées “Trésor public” ». L’opérationnalisation de la réforme du Compte unique du Trésor se situe dans la même mouvance.
Frédéric Nonos
Source : Investir au Cameroun